Construit près d’un belvédère qui surplombe le fleuve Saint-Laurent, le centre culturel Mani-Utenam encadrera parfaitement le paysage. Aux premiers abords, les plans 3D montrent un bâtiment d’apparence légère avec un revêtement blanc rappelant la nordicité. Les ouvertures, en plus de laisser voir une vue imprenable sur le coucher du soleil, s’apparentent à la forêt qui entoure le bâtiment. La verticalité des fenêtres remémore l’aplomb des troncs d’arbres. D’un côté, les ouvertures donnent vue sur le terrain du célèbre festival Innu Nakimu et de l’autre, elles aboutissent sur le fleuve.
Le centre culturel Tshissenitamun Mitshuap s’impose par sa structure en bois lamellé-collé que l’on peut apercevoir à travers le mur rideau de l’entrée principale. Le bois, caché à l’extérieur pour ne pas être exposé aux intempéries, est au contraire, laissé apparent dans l’aire centrale. La couleur claire que révèle l’épinette noire une fois coupé a poussé les architectes à son utilisation pour son côté discret permettant ainsi de mettre l’emphase sur les usages.
Une multitude d’usages
Une bibliothèque, une salle de médecine traditionnelle, un studio de musique, des ateliers d’artisanat, une salle de conférence, un atelier de fabrication de canots, font partie des multiples usages du bâtiment. L’expression Tshissenitamun Mitshuap qui signifie “maison du savoir” en Innu, prend alors tout son sens aux vues des nombreuses activités qui y seront pratiquées. À la demande du comité culturel, le centre se veut évolutif, pouvant se transformer en fonction des besoins.
Le bois et ses avantages
L’aspect chaleureux et naturel du bois a convaincu les architectes de proposer un projet de bâtiment comportant une structure apparente en épinette noire, “La structure même est apparente. Elle fait partie du décor, elle fait partie de la beauté de l’espace” a renchérit Bruno Morin, architecte associé principal chez Figurr et concepteur du projet. Entre les poutres, les colonnes et le platelage, ce sont au total 171 mètres cubes de bois qui ont été utilisé pour construire le centre culturel. Toutefois, l’aspect esthétique n’est pas le seul avantage de l’utilisation du bois dans ce projet, il y a également la question environnementale, le système structural et sa capacité acoustique.
Une structure complexe
Inspiré par la forme des Shaputuan Iinnus, des tentes coniques à deux portes, la complexité de la forme du bâtiment, c’est-à-dire conçu avec une façade circulaire, a représenté un défi de taille dans la phase de conception. En effet, initialement conçu, par les architectes, avec une seule pente de toit, le bâtiment final s’est donc constitué de 4 pentes de toit afin de répondre aux enjeux que la forme circulaire pouvait engendrer. Une conception qui a nécessité une collaboration fructueuse entre les architectes et les ingénieurs du projet. L’utilisation du bois, comme matériau dans ce système constructif, offre d’excellentes performances structurales. D’autant plus que la toiture continue au-delà du bâtiment, soit en porte-à-faux, afin de permettre aux usagers de travailler à l’extérieur tout en étant abrité. Ainsi, une structure en bois lamellé-collé a été utilisé dans ce bâtiment avec des portées pouvant atteindre entre 5m et 9,7m, soit au centre du bâtiment. Outre cela, la coupe diagonale de la façade nord attire l’attention sur l’entrée principale orientée vers le village et révèle la culture Iinnue avec l’ajout d’une œuvre d’art, prochainement.
Le bois atténuateur du son
Les architectes ont également fait appel à un consultant externe pour l’aspect acoustique du bâtiment. En effet, des événements musicaux, des spectacles, des conférences sont prévus dans l’aire centrale, la question de la réverbération du son a donc été majeure dans ce projet afin que le son de l’aire centrale ne transperce par les murs des ateliers de musiques, par exemple, et inversement. Le bois est connu pour réduire la transmission du son. Le bois a certainement contribué à l’amélioration acoustique de l’espace.
Un comité culturel impliqué
La volonté, depuis plusieurs années, de construire un nouveau centre culturel au sein du village de Mani-Utenam, situé dans la région de la Côte-Nord, a poussé plusieurs personnes de la communauté Innue à former un comité culturel. L’objectif de ce groupe était de réfléchir aux possibilités du projet et d’établir une liste des usages prévus dans ce bâtiment. Le comité avait à cœur un bâtiment, retranscrivant l’esprit des Shaputuan qui signifie “la grande tente de rassemblement” en Innu, permettant de rassembler et de transmettre le savoir innu et le choix de l’emplacement du site de construction. La structure en bois installée à l’automne dernier a permis de fermer le bâtiment avant la saison hivernale, prévoyant ainsi la livraison du centre pour l’été 2024.
-
Équipe projet :
- Client: Innu Takuaikan Uashat Mak Mani-Utenam (ITUM)
- Architecte : Figurr collectif d’architectes
- Ingénieur structure : Ashini Consultants
- Ingénieur mécanique : Ashini Consultants
- Fabricant de la structure de bois : Bois Hamel
- Entrepreneur : Mishkau Construction Inc.