You need to enable your cookies to buy on this website.

Connexion
Politique de protection des renseignements personnels Inscription

Actualités

Entrevue avec le ministre Pierre Dufour : « On veut que le Québec demeure un chef de file canadien dans cette tendance mondiale à construire des bâtiments plus verts avec le bois d’ingénierie. »

26 avril 2021

Le lendemain de l’annonce de la Politique d’intégration du bois dans la construction en décembre dernier, Cecobois a eu la chance de discuter virtuellement avec Pierre Dufour, ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs, afin d’en savoir un peu plus sur sa vision de la construction en bois au Québec. Résidant en Abitibi-Témiscamingue depuis son adolescence, M. Dufour démontre un enthousiasme certain pour que nos bâtiments et nos infrastructures mettent en valeur un matériau bien de chez nous et dont les vertus méritent d’être davantage reconnues.

Cecobois : Qu’est-ce qui vous a motivé à développer la Politique d’intégration du bois dans la construction 

Pierre Dufour : Je crois qu’il est d’abord important de se rappeler le contexte historique derrière la politique. En effet, en 2013, le gouvernement a adopté la première Charte du bois, qui a ensuite été reconduite en 2015. Mais quatre ans plus tard, on s’est questionné à savoir où allait cette Charte et ce que l’on pouvait faire pour l’améliorer. On venait d’assister à Woodrise 2019 qui s’était tenu à Québec et on voulait aller encore plus loin afin de stimuler la construction en bois au Québec. Notre but, on ne s’en cachera pas, est de devenir un modèle en matière d’utilisation du bois dans la constructionOn veut faire reconnaître le bois comme étant un matériau important et incontournable de la construction. En construisant davantage en bois, on favorise le développement économique régional, et pas seulement en forêt : au niveau de la deuxième et troisième transformation aussi. 

C : Concrètement, quelles sont les principales différences entre la Politique et la précédente Charte du bois?  

PD : En discutant avec les acteurs du milieu et avec mon chef de cabinet, on a réalisé qu’une politique avait beaucoup plus de poids qu’une charte puisqu’elle détermine des actions concrètes à poser. Dans l’ancienne charte, si ma mémoire est bonne, seulement 1 % des bâtiments publics devaient utiliser le bois. On était donc loin d’avoir un impact majeur. Notre volonté, c’est que le bois soit considéré dès que le gouvernement construit des bâtiments publicsOn veut aussi miser davantage sur la construction de ponts en bois et inciter également le secteur privé à emboîter le pasPour ce faire, nous croyons qu’il est primordial d’augmenter le pourcentage d’obligation.  

Mais une différence majeure consiste dans l’arrimage avec les autres ministères et organismes. Je suis en discussion avec mes collègues des autres ministères afin de ficeler les derniers détails des mesures qui seront mises en œuvre dans la Politique. Parce qu’il existe encore plusieurs éléments qui font en sorte qu’il est prématuré pour l’instant de divulguer les cibles que nous visons, notamment du point de vue de la réglementation qui doit être améliorée. La Régie du bâtiment du Québec va d’ailleurs jouer un rôle de premier plan dans cette politique, notamment en adoptant rapidement le Code national du bâtiment 2020 afin que les dernières connaissances scientifiques en matière de construction en bois soient prises en compte.  

Nous souhaitons aussi intervenir davantage au niveau de la formation des futurs professionnels. Seulement deux universités au Québec offrent des cours obligatoires sur le bois à leurs étudiants, ce n’est pas suffisantIl faudrait que tous les établissements d’enseignement offrent systématiquement des cours sur le bois dans leurs cursus de génie civil. Ceci permettrait aux futurs professionnels d’être mieux outillés pour utiliser le bois dans leurs projets de construction au même titre que les autres matériaux. 

C : Quelles sont, avec cette politique, vos intentions en matière de réduction des GES et de lutte contre les changements climatiques? 

PD : On connaît tous les bienfaits environnementaux d’utiliser le bois dans les bâtiments. La preuve nous a d’ailleurs été fournie par différents acteurs, dont le GIEC. On sait que la bille de bois qui est transformée en produit structural capture le carbone absorbé par l’arbre durant sa croissanceDe plus, le bois a un impact environnemental moindre que l’acier ou le béton puisqu’il émet moins de GES lors de sa fabrication.  

Le bois permet non seulement de réduire l’impact environnemental des constructions, mais aussi de créer des bâtiments signaturesOn le voit en Europe, aux États-Unis… On veut que le Québec demeure un chef de file canadien dans cette tendance mondiale à construire des bâtiments plus verts avec le bois d’ingénierie.  

C : Quelle est votre vision en ce qui concerne l’avenir de la construction en bois au Québec? 

PD : Je pense que l’avenir de la construction en bois réside dans l’amalgame avec les autres matériaux afin d’utiliser judicieusement les avantages et les forces de chacun. Je crois aussi que d’utiliser davantage le matériau bois va permettre d’accélérer les chantiers. L’Autriche a démontré à Woodrise qu’il était possible de construire un bâtiment de 24 étages en bois autour d’un noyau en béton. Tous les étages en bois s’empilaient à la manière de blocs LEGO. C’est la preuve qu’il est possible de construire davantage de bâtiments en bois de façon sécuritaire et intelligente en développant des solutions innovantes.  

Autre exemple : les ponts. On sait que c’est possible : on l’a vu avec le pont Mistissini et le pont du parc de la forêt Montmorency. Nous aimerions, par exemple, que 20 % des ponts soient construits en bois dans cinq ans. Pour vous donner une idée, nous avons pas moins de 250 ponts problématiques en Abitibi-Témiscamingue.  

Je pense aussi à un hôpital qui est présentement en construction en Colombie-Britannique. C’est ce que je voudrais pour le Québec : que nos Maisons des Aînés intègrent davantage de bois. Le bois est à mon avis un élément signature que l’on n’exploite pas suffisamment au Québec. Nous avons entre les mains une ressource exceptionnelle : nous devrions en être fiers et le montrer dans les choix de matériaux que nous faisons.  

Si on était capable ne serait-ce que de doubler le nombre de bâtiments construits en bois au Québec grâce à la Politique, ce serait déjà une belle réussite à mes yeux.